"C'est souvent à partir de la petite histoire que se fait la grande"
HISTORIQUE DU CONSERVATOIRE DES APPROVISIONNEMENTS EN PRODUITS DE SANTÉ DES ARMÉES (CAPSA)
1° Période : Mondeville (Calvados), le CMSSA, Conservatoire des Matériels du Service de Santé des Armées
L’histoire du conservatoire commence à l’Etablissement Central des Matériels de Mobilisation du service de santé des armées (ECMMSSA) de Mondeville près de CAEN.
De 1984 à 1987, de façon informelle des collections ont été rassemblées à la pharmacie générale de l’établissement à l’initiative du Pharmacien Chimiste en Chef Henri Floch et de l’Adjudant François Olier. Ce sont des matériels anciens de diverses origines : dotations « santé » d’hôpitaux complémentaires, lots de précaution constitués à partir de ressources sanitaires inutilisées voire inutilisables, équipements hérités des guerres du XXème siècle d’origine allemande, américaine, anglaise et française.
A la prise de fonction de chef d’établissement du commandant Gérard Remuson en 1987, le stock de matériels est défini comme Conservatoire des Matériels du Service de Santé des Armées (CMSSA). Une organisation est mise en place avec un local dédié et un personnel chargé de collecter et d’aménager les locaux nécessaires au stockage.
La reconnaissance de cette dénomination permet de recevoir régulièrement des matériels : ceux des formations dissoutes comme le Magasin Général du Service de Santé (MGSS) et la Pharmacie Générale du Service de Santé (PGSS) de Mondeville, stocks sanitaires nationaux de mobilisation après dissolution des établissements de ravitaillement d’Ardentes (Indre), de Châteauroux (Indre), de Lunel (Hérault) entre autres, ainsi que des formations sanitaires de campagne disloquées en fonction des évolutions opérationnelles du Service de Santé des Armées.
En 1990, une inspection conjointe du médecin général inspecteur Régis Forissier de la Direction Centrale du Service de Santé des Armées (DCSSA) et du Pharmacien chimiste général inspecteur Gilbert Duval de la Direction des Approvisionnements et des Etablissements Centraux du service de santé des armées (DAEC) permet d’entériner l’existence du conservatoire sans officialisation formelle par circulaire ministérielle. Le conservatoire reste donc une création de facto.
L’administration centrale et la direction des approvisionnements décident ainsi de la sauvegarde d’un exemplaire de tous les matériels sanitaires. Tous les établissements reçoivent donc pour consigne de verser sur Mondeville les matériels anciens qui paraissent avoir un intérêt patrimonial, y compris les remorques et véhicules techniques spécialisés.
Les collections constituées sont complétées par des apports du monde civil et de collectionneurs qui proposent l’échange d’objets.
Dès lors, le conservatoire est structuré avec son organisation propre. Les locaux, sur trois niveaux, accessibles aux camions, se composent d’espaces bureau et de réserves dont une spécialisée pour les objets à conserver à l’abri de la lumière, d’un espace de présentation et d’exposition de 800 m2.
Deux personnes sont affectées au CMSSA avec comme fonction de collecter, identifier, stocker les matériels susceptibles d’avoir un intérêt patrimonial. Au-delà de cette mission, le conservatoire s’emploie à réaliser des présentations thématiques d’objets, à procéder à des cessions gratuites et à formaliser des prêts.
Il constitue une réserve pour le musée du Val-de-Grâce.
Le conservatoire présente un attrait à la fois interne et externe.
1 - Au sein de l’ECMMSSA,
Le personnel de Mondeville partage largement cette passion de préserver et conserver ce patrimoine en collaborant à diverses activités comme :
- La réalisation d’éléments pour la présentation des collections ;
- La réalisation de quatre maquettes par l’équipe de veilleurs de nuit de l’établissement dont :
o celle de l’établissement et de son emprise (photo);
o une formation sanitaire de campagne des années 1980 (photo);
o l’hôpital du Corps Expéditionnaire Français au pied du Mont-Cassin (photo);
o le nouveau bâtiment de la direction des approvisionnements et établissements centraux des militaires (photo);
- La restauration par des techniciens des matériels santé :
o d’une remorque de radiologie Sueur (photo);
o d’un appareil de radiologie.
2 - La collaboration externe
Elle s’exerce au travers de :
- visites des collections par un public varié ;
- cessions gratuites de matériels sanitaires surtout français et américains aux musées locaux et au profit de l’aménagement d’une infirmerie complète type Maginot au fort St Roch à Sospel (Alpes-Maritimes) ;
- prêts d’objets à l’intention de manifestations diverses comme :
o des productions cinématographiques tel que « la chambre des officiers » ;
o l’équipement de figurants pour manifestations patriotiques.
Au mitan des années 1990, le conservatoire va connaître une phase particulièrement difficile due à l’annonce souhaitée de la fermeture de l’établissement fin des années 90 et sa dissolution réelle le 1er juillet 2009. Dix années déstabilisantes pour les personnels de l’établissement et critiques pour la pérennisation des articles du CMSSA sélectionnés avec minutie. Cette sauvegarde d’un ensemble cohérent et pédagogique avait pour objectif de les sanctuariser afin de les faire découvrir au plus grand nombre et de les transmettre aux générations futures.
Au cours de cette période le conservatoire ne semble plus retenir le même intérêt pour tous. Une désarticulation et une diminution sévère des collections va s’opérer sans discernement pour une question d’espace ou de commodités, dont la totalité des matériels roulants tel que les remorques techniques et les camions atelier. Enfin, l’amenuisement des collections s’amplifie lorsque l’on confie cette mission de retraits à des personnels qui n’ont pas les connaissances nécessaires pour pondérer ce gâchis.
Pendant les modalités administratives de fermeture, certains acteurs du ravitaillement, amenés à se rendre sur place pour récupérer du mobilier ou de la matière première pour les ateliers du site militaire de Chanteau, vont découvrir ce patrimoine restant et prendre conscience de ce qu’il représente historiquement, techniquement et sentimentalement pour une majorité des personnels encore présents.
Une idée de sauvegarde commune va émerger : fédérer des énergies et développer un dynamisme pour procéder au transfert des collections.
Le conservatoire achève sa première étape sur le site de Mondeville, le 1er juillet 2009, suite à la dissolution de l’ECMMSSA. Le problème de la pérennité des collections reste posé…
Les initiatives individuelles et collectives du Calvados au Loiret vont générer des liens qui permettent l’élaboration pratique de l’enlèvement. Grâce à un remarquable conditionnement, les collections parviendront sur le camp militaire de Chanteau dans leurs vitrines d’origine pour les têtes de série d’instruments et dans les armoires palettes.
2° période : Chanteau (Loiret) : quand le CMSSA, Conservatoire des Matériels du Service de Santé des Armées devient, Conservatoire des Approvisionnements en Produits de Santé des Armées (CAPSA) :
Face aux risques de dispersion ou de disparition des nombreux objets et matériels, il devient impératif de procéder au transfert des collections sur le site militaire d’Orléans-Chanteau.
Vingt-trois camions et leur remorque en attelage complémentaire partent de Mondeville vers Chanteau.
Dans un premier temps, une petite équipe de quatre personnes, particulièrement motivée (Didier Cagnard, Christian Dezilleaux*, Michel Farouault, Blandine Lauverjat rejoints par Pascal Priou*) vont entreprendre une première esquisse de stockage.
La découverte fortuite de ces collections par les autorités en charge du ravitaillement sanitaire va les amener à s’interroger sur leur devenir. Le pharmacien en chef François Quéguiner, directeur-adjoint de la direction des approvisionnements en produits de santé des armées (DAPSA) va appuyer cette démarche. Ils obtiennent la validation de la création par le médecin général inspecteur Pierre Huet-Pailhès, directeur des APSA, d’une structure qui prendra le nom de conservatoire des approvisionnements en produits de santé des armées (CAPSA).
Un premier lieu d’exposition est conçu à partir d’un hall et d’une ancienne salle de restauration. La mise en place est effectuée par les cinq bénévoles qui sont rejoints par Christophe Dugault**, deux réservistes (Gérard Halley - pharmacien chef des services de classe normale et Pascal Hugedé -colonel du corps technique et administratif du service de santé des armées).
Une aide complémentaire et déterminante, compte tenu des délais impartis entre l’installation et l’inauguration est apportée par des personnels du site de Chanteau dont cinq anciens ouvriers de l’Etat de Mondeville. Deux de ces derniers avaient exercés leur talent de maquettistes sur Mondeville : Thierry Lorier*** et Pascal Hubert***.
Le nouveau conservatoire est inauguré le 14 février 2011 en présence de François Olier** qui fut à l’origine de sa création et de son développement sur Mondeville en 1987.
* Personnels de l’Etablissement Central des Matériels de Mobilisation de Mondeville (ECMMSSA)(14) ayant rejoint les établissements du ravitaillement médical de Chanteau ;
** Une structure de la direction générale de l’armement avait été transférée sur le site de Chanteau. Dissoute en 2010, les personnels de cette formation furent affectés sur le site de Chanteau.
***Pour mémoire les personnes ayant réalisé sur ECMMSSA de Mondeville les quatre maquettes : ECMMSSA sur son emprise (800 h), une formation sanitaire de campagne dans les années 1980 (1200 heures), l’hôpital du corps expéditionnaire au pied du Mont CASSIN (1 800 h), le bâtiment de la nouvelle DAEC.
****Biographie de François Olier : voir la rubrique « Ces individus qui ont contribué à valoriser le ravitaillement médical et le service de santé des armées ».
Deux opérations vont être entreprises au cours des années suivantes, le transfert des stocks de la zone technique du bâtiment 132 vers les anciens ateliers d’entretien du site bâtiment 057 (2011-2012) puis une salle d’exposition temporaire aménagée dans les locaux d’une ancienne laverie à plateaux située dans le prolongement de la salle d’exposition principale bâtiment (2012-2013).
La découverte du CAPSA au cours de différentes visites, entraîne de multiples sollicitations de municipalités, d’organismes publics ou privés pour prendre part à des expositions en lien avec le service de santé des armées pour le centenaire de la Grande Guerre.
Ces demandes vont permettre enfin de mettre en lumière le rôle et les réalisations du ravitaillement médical au cours cette période et bien au-delà.
En 2013, afin de pouvoir faire aux demandes et disposer d’une certaine autonomie tant financière que logistique, une association appelée « Autour du conservatoire des approvisionnements en produits de santé des armées » (ACAPSA) est créée par les bénévoles le 13 février 2021.
Elle devient la structure à soutenir le CAPSA pour répondre au mieux aux sollicitations. La multiplication des demandes impose une organisation rigoureuse demandant une planification annuelle de ses activités.
Au fil des visites, les nombreux reversements effectués au CAPSA et les dons apportés à l’ACAPSA enrichissent et diversifient les collections. Il devient nécessaire que le CAPSA s’agrandisse et soit installé dans des locaux plus vastes. Ils permettent ainsi de pouvoir présenter un échantillonnage significatif des collections et l’identité des donateurs.
Le « peigne » ancien hôpital militaire construit par les Américains, qui a connu bien « des locataires »* et dont certaines parties ne sont plus occupées, offre une opportunité intéressante au regard du projet global souhaité.
Bien peu croient en la réalisation de ce projet ambitieux porté par Michel Farouault, président de l’ACAPSA. Beaucoup le pensent surdimensionné. Sur quatre bâtiments disponibles (021, 022, 023 et 025) seuls deux permettent un aménagement adéquat. La réhabilitation des deux autres bâtiments n’a pas été envisagée.
2015 - 2016 : Après d’âpres négociations, Michel Farouault, obtient du pharmacien général inspecteur François Queguiner l’ensemble des locaux qui composent le bâtiment 023 d’une surface de 2240 m². Situé au milieu du peigne, ce lieu fait d’abord puis l’objet d’un nettoyage conséquent et d’une remise en état complète par les membres et bénévoles. Ces premières opérations durent toute l’année 2016.
Ces nouveaux locaux retenus pour optimiser un stockage dit « de présentation » reçoivent au cours des huit premiers mois de 2017, les objets et supports afin de présenter divers thématiques du ravitaillement sanitaire et ses réalisations à travers trois circuits principaux. Diverses salles sont dédiées à certains statuts, aux interventions humanitaires, aux différents vecteurs sanitaires. Il est également procédé à la mise en place de bibliothèques.
*Les cinq dents du peigne prévues pour être un hôpital a connu différents locataires : Ecole pour les enfants des Américains de la livraison des lieux à 1967 / Ecole des sous-officiers du service de santé sous deux appellations (ESOSS et ESOSSAT de 1968 à 1986) / Compagnies au profit du 28ème régiment de transmissions de 1986 à 1998 / Eléments d’Eclairage et d’Investigation de la 2ème brigade blindée de 2005 à 2010 / 2010 - 2015 compagnie de ravitaillement sanitaire du régiment médical.
Suite à l’impossibilité d’obtenir dans son intégralité le bâtiment 057, le stockage de l’uniformologie et les ateliers image et son occupent des pièces initialement prévues pour la présentation de professions telles les soignants, les différentes catégories de personnels administratifs civils, militaires et les ouvriers de l’Etat.
Concomitamment à cet évènement, le conservatoire va connaître de nouvelles évolutions avec la réception de matériels majeurs comme des shelters, des remorques techniques mises en situation devant le bâtiment 057. La décision de retrait des shelters du plan opérationnel a bénéficié au conservatoire. Le régiment médical de la Valbonne livre sur Chanteau différents modules. Six d’entre eux ainsi que des servitudes vont être déployés sur l’emplacement de l’ancien parking des ateliers d’entretien du bâtiment 057 sur 800 m².
Ces éléments techniques modulaires se composent de deux modules chirurgie, deux réanimations, un laboratoire, une pharmacie quatre modules servitudes. Leur déploiement est réalisé par les personnels de l’atelier NTI2/NTI3* « Modules Techniques » du groupement technique et par Nicolas Leménager et Patrick Morin, membre de l’ACAPSA. Ces derniers complètent l’aménagement intérieur et veillent au suivi et à l’entretien.
Deux apports supplémentaires viennent rejoindre la plateforme : une remorque buanderie et une de stérilisation. Le quatrième thème est en place.
2017 : C’est au cours des manifestations du centenaire de la création de la direction des approvisionnements en produits de santé (DAPSA)** le jeudi 28 septembre 2017 que fût présenté officiellement le nouveau conservatoire aux autorités civiles et militaires dont un grand nombre appartenant au Service de Santé des Armées. C’est l’aboutissement de huit mois d’un investissement collectif sans relâche des membres de l’ACAPSA, mais également de quelques personnels du site. Les mises en place en situation étaient réalisées après les heures de travail et les vendredis après-midi et samedis avec le renfort de membres extérieurs de l’association venant de différentes régions.
2018 : La dernière année des commémorations de la Grande Guerre génère beaucoup de prêts pour un nombre important d’expositions, en particulier dans le Loiret.
2019 – 2020 – 2021 : L’aménagement de nouvelles salles et de nombreuses optimisations des installations de stockage et de présentation se poursuivent dont :
- Fin 2019 : transfert des matériels du bâtiment 033 vers le bâtiment 023, suivi de la mise en place de vitrines et d’objets de patrimoine au bâtiment 033 devenu pièce de réception. Un nouveau matériel majeur rejoint la plateforme : un tomoscan;
- 2020 – 2021 : Malgré la pandémie, il sera effectué des opérations d’entretien. Une salle réservée à l’art vétérinaire est en cours de finalisation. De nouveaux mannequins prennent leur place dans différents lieux.
- En 2020, des meubles fabriqués dans les années cinquante par le magasin général du service de santé de Sainte-Menehould (51- Marne) sont remis au CAPSA.
Une nouvelle salle de réception au bâtiment 033 est réaménagée et inaugurée sous l’appellation salle du pharmacien chimiste général inspecteur Gilbert Duval.
*Atelier NTI2 et Atelier NTI3 : niveau technique d’intervention (NTI)
La fonction maintenance est organisée dans les armées suivant trois niveaux techniques d'intervention (NTI)
NTI 1. (entretien courant). NTI 2. (réparation). NTI 3. (maintenance industrielle)
**la direction des marchés d’approvisionnement (D.M.A.) qui fut créée le 24 juin 1917. Elle s’installe près de son sous-secrétariat d’Etat au numéro 272 du boulevard Saint-Germain à Paris.
Ces actions n’ont pu se réaliser que grâce à une volonté fédératrice basée sur les compétences et le savoir-faire de chacun mis au service d’une cause et d’un but commun faisant abstraction des égos.
Cela a permis de la réactivité dans les actions de création et de sauvegarde.